[RPG-MAKER.FR] Oniromancie: tout l'univers de RPG Maker en français

Moi pas.
Beaucoup de gens ont pointé le scénario prétenduement " format timbre poste" comme le point noir qui interdirait à Gravity d'être le film de catégorie supérieure.
Sans doute parce qu'ils limitent le scénario d'un film aux infos qui sont données explicitement, prémachées dans des dialogues explicatifs (des casuals cinéphiles, en somme

), oubliant un peu vite que par essence même, le cinéma fait passé des infos par les images. Et ces images lourdes de sens, Gravity les enchaîne.
Donc si on se donne la peine d'analyse ce qu'on a devant les yeux (du moins ce que j'ai eu sous mes yeux à moi, on va dire) le pitch de Gravity, c'est ça (ça fait un assez gros timbre) :

/!\Attention ce spoiler contient des spoilers/!\

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Je vous avais prévenus

Soient des humains pleins d'arrogance qui plonge avec insouciance dans un environnement hostile, tout confiant qu'ils sont de leurs acquis, de ces constructions issues de leurs cerveaux qui sont sensés les protégés du danger, ils se permettent de déconner, de faire des pirouettes dans l'espace. Sauf qu'avec cette même arrogance des Russes lointains et anonymes décident de péter un de leurs propres satellites pour leur confort, dynamitant par la même toutes ces constructions humaines qui avaient l'air pourtant si sûre dans le silence cotonneux de l'espace, en orbite autour de somptueux panoramas de la Terre. Et des minuscules débris vont renvoyer ces vaniteux à la réalité, à la froideur mortelle de l'espace. Alors l'homme redevient un animal qui se débat pour survivre, s'accrochant aux vestiges de son intellect qui s'écroulent, ces stations qui tombent morceaux l'une après l'autre, ces langages qui empêchent de communiquer, cette radio désespérément muette,
jusqu'à se retrouver au pied du mur, en panne dans une navette qui représenté sa dernière chance, son appel de détresse reçu par un type qui ne bite pas un mot de ce qu'elle raconte. L'héroïne en est réduite à pousser des glapissements bestiaux, une imitation du chien totalement creuse qui n'amènera que le rire inconscient de son interlocuteur.
Beaucoup on critiqué le pathos de cette scène, mais c'est précisément l'idée, une scène pathétique, l'ultime échec de l'humain à se maintenir en vie par ses constructions intellectuel. L'héroïne ne peut que se raccrocher à cette vague croyance que ça ira mieux après, qu'elle va retrouver sa fille, ce qui ne fait que la précipiter plus vite dans sa chute, à baisser les bras et se résigner à la mort.
Mais c'est au milieu de cette lente agonie que l'instinct animal se réveille, et l'héroïne de décider que si son monde autrefois douillet fout le camp, elle n'a qu'à s'en construire un elle-même. En imaginant un partenaire qui pour lui mettre un coup de de pied au cul et la remettre en course, un vétéran qui viendrait lui-même de survivre contre toute probabilité en puisant jusqu'au fond de ses réserves, en contournant la barrière des langues grâce à l'instinct (alors oui, démarrer une fusée en jouant à Am-Stram-Gram, c'est très très gros, mais pas inintéressant pour le coup), en répétant à une radio qui ne répondra pas les âneries de feu le chef d'expédition, sans vraiment tenir compte du sens, comme défi aux inimité de l'Extérieur, un cri de guerre pour se motiver, et dans cet élan défier les péril et retourner saine et sauve vers le plancher des vaches...
Lequel brisera de nouveau sa carapace en changeant les règles, la radio qui fonctionne de nouveau, mais à laquelle elle ne pourra pas répondre, cette eau pesante qui s'engouffre dans l'écoutille à peine ouverte, qui imbibe sa combinaison et freine ses mouvements. Mais surtout cette gravité qui donne son nom au film, qui l'écrase dans la boue alors qu'elle se croyait sortie d'affaire, qu'elle va devoir réapprendre à maîtriser, en s'adaptant de nouveau. Le même apprentissage qu'on fait nos ancêtres il y a des milliers d'années, mais que dans notre arrogance, dans notre petite bulle intellectuel douillette nous tenons pour acquis. Gravité, ce nom martelé une dernière fois à la toute fin, pour rappeler à l'homme sa place d'animal, l'inviter à toujours aller de l'avant, à ne jamais rien tenir pour acquis, à toujours continuer sans s'entraver avec ses propres chimères, tel ce deuil dont l'héroïne a su se libérer, et qui paraît à la fin bien anecdotique fasse au reste.

De même le personnage de l'héroïne est clairement défini, comme animal avec "non-personnalité" celle-ci étant parfaitement inutile là où toute structure social part en morceau. Les quelques vestiges qui en sont montrés sont soit des élucubrations creuses (les anecdotes du chef d'expédition), soit une entrave (le deuil de la fille).

Donc voilà. Ce film m'a retourné comme une chaussette et liquéfié sur mon fauteuil. Je trouve qu'il est excellent à tous les niveaux (certes, il y a plusieurs facilités dans le scénario, mais rien d'assez gros et/ou gratuit pour dépasser le niveau "OSEF" de mon suspenseur d'incrédulité, et avec la puissance immersive du film ils cessent tout simplement d'exister) et tout à fait mémorable.

Par contre la 3D comme d'hab : cool au début, mais au bout de 20 minutes de film on y fait plus gaffe du tout et donc ça ne sert plus à rien

Non mais faut mettre les lunettes pour que ça marche

Je dois dire que je suis assez surpris. J'ai trouvé ça terriblement efficace du début à la fin. Surtout que suite à des événements indépendant de ma volonté, mais que je ne regrette pas du tout, je me suis retrouvé au 3ème rang. Et j'étais DANS le putain de film. Mon père qui était avec moi et l'avait déjà vu en étant plus loin m'a dit que ça changeait tout, et que ça valait le coup de se refaire une séance avec un placement différent.